Les pales de la taille d’un Airbus tournent derrière 80 mâts blancs, au large de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), à 15 km des côtes. Le bus transportant Emmanuel Macron et sa délégation jeudi 22 septembre s’annonce petit au milieu de cette forêt d’acier en mer, premier parc éolien offshore français. Il a fallu quatorze ans et quatre mandats présidentiels pour qu’un chef d’État l’inaugure enfin. « Un jour heureux ! « Célébrons Emmanuel Macron. Avant d’admettre, mezzo voce, que “sur une échelle de commandement, c’est quelque chose de terriblement décevant” de démarrer un projet sans en voir les fruits. En janvier 2011, Nicolas Sarkozy est venu ici annoncer la conquête de l’éolien offshore, transmise au Grenelle de l’environnement en 2008, et la construction des navires Mistral promis à la Russie.
Emmanuel Macron ne s’est pas trompé. C’est ce qu’a semblé dire le chef de l’Etat lorsqu’il a repris le fil de son discours de Belfort qui, en février, a défini une stratégie énergétique sur trois piliers : sobriété, renouvelables, nucléaire. Une politique qu’il considère comme “validée par la guerre en Ukraine” et sa conséquence cynique, le chantage de Vladimir Poutine au gaz russe. “La clé d’un point de vue énergétique est la diversification”, réitère-t-il à propos de son virage nucléaire. Satisfait d’une option de dominance, mais qui ne s’est pas matérialisée, il veut désormais “aller deux fois plus vite” sur le développement des énergies renouvelables.
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Mais le “jour glorieux” cache mal le mur qui se dresse encore devant lui. Espérant répondre aux besoins en électricité qui bondiront « massivement » de 40 %, Emmanuel Macron garde le cap : il possède une cinquantaine de parcs éoliens offshore d’ici 2050. 40 gigawatts de puissance à distance de marche des chantiers. Mais la France a pris un retard incroyable. Le chef de l’Etat n’a pu que constater, à trois reprises, que “nos voisins vont beaucoup plus vite”. Outre les 81 éoliennes offshore françaises, la Belgique en compte 400, le Danemark 630, l’Allemagne 1 500 et le Royaume-Uni 2 500… L’ambition française pour 2050 atteindra le niveau britannique actuel.
Lent et imprudent
Pendant ce temps, la technologie avance au galop. Le parc commandé il y a dix ans (6 mégawatts) n’est plus à la pointe de l’innovation (14 mégawatts). “En 2011, nous étions en tête de la vague. Maintenant on est derrière, même si c’est encore une Ferrari”, reconnaît Olivier de la Laurencie, directeur du parc éolien de Saint-Nazaire. Impossible de recommencer. “Ce n’est pas comme changer une ampoule”, ironise Franck Louvrier, maire de La Baule. Pourquoi une implantation offshore éclot-elle en cinq ou six ans dans les pays voisins, contre dix ans en France ? La faute aux retards et aux indisciplinés, limoge le chef de l’Etat. Et surtout dans les “appels d’expansion”. Un problème dans un monde concurrentiel où Américains et Britanniques équipent déjà leurs éoliennes à Cherbourg et Saint-Nazaire. Il vous reste 60,78% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.