La question n’est plus de savoir s’il y aura une rupture, mais quand. Six mois après la réélection d’Emmanuel Macron et un peu plus de quatre après son échec à conserver la majorité absolue à l’Assemblée nationale, le caractère inévitable et à moyen terme d’une telle opération ne fait plus de doute. “Dans l’écosystème majoritaire, c’est dans l’air”, confirme un habitué élyséen. Subtil euphémisme. Car côté Renaissance tout est prêt. Dans les moindres détails. La question a également été évoquée jeudi au bureau exécutif du mouvement présidentiel. “La partie est parée à toute éventualité”, a assuré le numéro un Stéphane Séjourné, avant d’indiquer que ses équipes travaillaient depuis un mois “pour arriver à quelque chose de fonctionnel”. Un “protocole de dissolution”, avec une “refonte détaillée” indiquant précisément, jour par jour, les étapes de l’opération, a déjà été établi. A lire aussi – Stéphane Séjourné, l’homme qui organise l’après-Macron En voici des extraits : au lendemain de l’annonce de la dissolution, échanges avec les partenaires majoritaires, le MoDem de François Bayrou et le mouvement Horizons d’Édouard Philippe. A J+3, désignation des candidats, qu’il y ait accord ou non avec les alliés, par un comité national. A J+4, conférences de presse locales de tous les candidats, partout en France. A J+5, séminaire de formation des candidats.

Une menace qui avait déjà été lancée le 28 septembre par Emmanuel Macron

Les petites mains du parti ont également assuré que le mouvement pouvait financer, sans perdre un sou, les campagnes des candidats qu’ils envoyaient sur le terrain, afin qu’ils n’aient pas à recourir à des prêts personnels. Les futurs prétendants de la Renaissance peuvent se reposer : « Nous avons plus de 40 millions d’euros de biens immobiliers, rapporte un gérant. Si besoin, nous aurions un prêt très rapidement sans problème. Peu de virgules sont dans ce cas. » Tout a donc été étudié. Stéphane Séjourné, qui s’est lancé dans un tour de France, ambitionne de voir désigner, en février, un représentant dans chaque circonscription électorale dont le député n’est pas un élu de la mouvance présidentielle, afin “d’avoir partout une présence politique de la Renaissance”. sur le territoire ». explique un lourd. Et pouvoir, le moment venu, nommer immédiatement des candidats opérationnels qui connaissent leur territoire. “ Le gagnant est celui qui parvient à être du côté de l’ordre et du mouvement, contre ceux qui sont du côté du chaos et du blocage. “ Si Séjourné, historiquement proche du Président, a pris les devants, ce n’est pas tout à fait par hasard. Ces dernières semaines, la réflexion d’Emmanuel Macron a mûri. Il avait déjà proféré cette menace le 28 septembre, devant les chefs de la majorité conviés à un dîner à l’Elysée, assurant qu’il sortirait l’arme de la dissolution si l’opposition votait ensemble une motion de censure, faisant ainsi tomber le gouvernement d’Elizabeth Bourne. Lors de son passage sur France 2, le 26 octobre, il l’a répété : « Il y a des instruments qui sont entre les mains du président de la République. » Lire aussi – Assemblée nationale : après chaque 49-3 une motion de censure sera-t-elle déposée par les Nupes ?

Jouer sur la fracture entre ordre et chaos

Emmanuel Macron, apparemment, prépare les esprits. “Le rôle du Président est de colorer l’opinion”, confirme l’un de ses invités du soir. Le Président et plusieurs de ses conseillers ont ainsi revisité l’histoire des dissolutions. A commencer par celle ratée de Jacques Chirac en 1997, qui avait vu ce dernier perdre sa majorité au profit des socialistes. Diagnostic d’un proche : « Une rupture, se prépare. Pour celui de Chirac, les esprits n’étaient pas totalement préparés. Cela avait été perçu comme une dissolution du confort. » C’est pourquoi, sur France 2, le chef de l’Etat a commencé à marquer le terrain de l’affrontement. Et, ciblant notamment Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, il a condamné “ceux qui croient au désordre”. Légende d’un habitué de l’Elysée : “Entrer dans une dissolution ou un référendum en disant ‘c’est l’ordre ou le chaos, le travail ou le désordre’ est un enjeu clair.” Pour nous c’est le déchirement des prochains mois. Et on demandera aux Français de choisir. Un autre cercle proche de Macron confirme : « Celui qui gagne est celui qui parvient à être du côté de l’ordre et du mouvement, contre ceux qui sont du côté du chaos et du blocage. Mais ce seront aussi eux qui seront les mieux préparés. C’est à nous de faire en sorte que la pièce tombe en notre faveur… » “ Rompre aide à se rappeler qui est le patron “

Resserrer les rangs de la majorité

Cela reste la question du moment. Après le vote sans encombre du texte sur le pouvoir d’achat en juillet, et alors que les textes budgétaires vont être votés grâce au 49-3, « on sent qu’on entre vraiment dans le vif du sujet : ça va être plus dur de trouver une majorité”, poursuit-il. Le proche. Certes, le projet de loi sur l’accélération des énergies renouvelables a été adopté au Sénat dans la nuit de vendredi à samedi. Mais il n’est pas certain que l’Assemblée nationale suive. Le projet de loi sur l’immigration ou la réforme des retraites, prévu pour le début de 2023, pourrait déclencher l’impasse politique insoluble ou l’implosion sociale qui justifie l’opération de rupture. L’”expérience dangereuse” de 1997, selon les mots de l’ancien Premier ministre Lionel Jospin, qui reste dans les esprits, “un grand danger est d’apparaître comme un homme politique, prévient un habitué de l’Elysées. On a toujours besoin d’une excuse comprise de tous dans une rupture majeure. » A lire aussi – Jean-Paul Mattei, le Bayruista qui énerve la majorité Autre bénéfice politique, interne à celui-ci, et moins reconnu : resserrer les rangs d’une majorité au sein de laquelle MoDem et Horizons ont affiché des velléités émancipatrices face à l’Elysée. “Il y a une question de gestion de la majorité et la dissolution permet de se rappeler qui est le leader”, plaide un proche d’Emmanuel Macron. Le message est le suivant : si vous continuez à bricoler des amendements vus par l’Elysée comme orthogonaux au dogme macroniste, cela pourrait devenir un problème. “L’essentiel demeure : les chances des macronomes de retrouver la majorité absolue. Leurs stratèges espèrent que dans de nombreuses circonscriptions où des batailles très serrées contre des candidats de la Gauche unie derrière la bannière Nupes avaient vu ce dernier l’emporter en juin, il en sera autrement. Ce que rien, à ce stade, ne garantit.