Dans la première question, Jacques Boutier a commencé à parler de sa “vieillesse”. Dans le second, il vante les mérites de « l’échafaud ». Le septième, il regrette de ne pas pouvoir se procurer une “pilule de cyanure”… Interné à la maison d’arrêt de Fresnes (Val-de-Marne) depuis le 23 mai, Jacques Bouthier commence à trouver beaucoup de temps. C’est en effet ce qu’il a indiqué, le 28 juillet, au juge d’instruction chargé de l’instruction de l’enquête pour viols sur mineurs et traite des êtres humains lors d’un interrogatoire que BFMTV a pu consulter. S’il aspire désormais à mourir, l’ancien PDG d’Assu 2000, accusé d’avoir créé un système lui permettant d’agresser de jeunes filles mineures, semble avoir du mal à se rendre compte de l’ampleur des charges qui pèsent sur lui. retenue. “Ils m’ont complètement tué, raconte-t-il au juge. Je voulais travailler encore 10 ans. Je comprends que ça n’en vaut pas la peine. J’apprends à pêcher et à jouer à la pétanque et je passe le relais à quelqu’un de plus jeune que moi.”

“Je me suis comporté normalement”

Un passage qui oblige alors le juge à repartir sur le fond pour faire ouvrir une enquête. “J’ai appris que j’ai profité de la détresse du plaignant, oui”, répond-il avant d’évoquer ses pensées suicidaires. Car au fond, le multimillionnaire a du mal à voir le problème. Alors qu’il est accusé d’avoir abusé pendant des années de jeunes filles mineures qu’il habitait dans un appartement loué spécialement pour ses besoins, il écarte tout cela. “Et [l’une des plaignantes] il m’avait donné l’impression à un moment que notre relation le pesait, j’aurais arrêté. Je me suis comporté avec elle, comme un homme se comporte avec une femme, normalement”, affirme-t-il. Un peu plus tard, lors de cet interrogatoire, il expliquera même que sa seule “erreur” est de ne pas avoir fait les démarches nécessaires pour que la jeune femme qui l’accuse ait un titre de séjour. “Je ne savais pas comment l’obtenir”, ajoute-t-il.

Il voulait “qu’on lui donne de l’ukrainien”

Des propos qui correspondent finalement à la manière dont l’ancien directeur général du groupe d’assurance considère les femmes et que les enquêteurs ont pu percevoir. Car avant de l’arrêter en mai, les policiers ont passé de nombreuses heures à l’écouter, à écouter ses conversations téléphoniques. Echangeant avec son interlocuteur précisément au sujet de la jeune plaignante, il apparaît un jour menaçant : “Je lui réserve un comité d’accueil quand elle arrivera au Maroc, je la mettrai dans une maison de tolérance des militaires au fin fond du sud marocain.” Dans une autre audition, on l’entend également assurer qu’il va « livrer quelques Ukrainiens », les prix, selon lui, ont « baissé » depuis la guerre. En substance, Jacques Boutier conteste les faits qui lui sont reprochés. Interrogé sur la vidéo le montrant au lit avec une jeune adolescente, qui est à l’origine de toute l’affaire, il dénonce “piège” et “mensonges”. A la fin de son audition, quand le juge lui demande s’il veut ajouter quelque chose, il s’épanche encore sur son propre destin. « Tu m’as convaincu de prendre une pilule », jaillit-il. Il ajoute qu’il regrette de ne pas avoir passé plus de temps avec sa famille quand il en avait l’occasion. Comme s’il avait soumis toute cette situation à son ex-femme. Interrogée quelques jours plus tôt par le même juge, elle n’était pas entrée dans les détails pour parler de lui : “C’est un homme très malade. C’est un déchet. C’est de la merde”, avait-elle déclaré. Par Vincent Vantighem et Mathias Tesson