La Russie a envoyé mardi en France l’un des six aimants géants prévus pour mettre en œuvre le programme Iter sur la fusion nucléaire, l’un des grands projets scientifiques internationaux dans lequel Moscou reste impliqué malgré les sanctions. Sous un ciel gris d’automne, l’engin transportant la “bobine de champ polarisé” fabriquée en Russie sous la direction de l’agence atomique Rosatom, a décollé de Saint-Pétersbourg (nord-ouest), ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse. L’imposant aimant de 9 mètres de diamètre et pesant 200 tonnes a été emballé pour le voyage qui devrait durer quinze jours et passer par Amsterdam pour rejoindre Marseille dans le sud de la France. Cette bobine, en forme d’anneau, doit former la partie supérieure de la structure du “tokamak”, cette machine expérimentale en construction dans le sud de la France, qui vise à contrôler la production d’énergie à partir de la fusion de l’hydrogène, comme au coeur du Soleil. A lire aussiIter, le projet de fusion nucléaire, avance pas à pas “Sans la bobine PF1, le tokamak ne peut pas fonctionner”, a résumé à l’AFP Leonid Khimtchenko, directeur adjoint des affaires techniques au Centre-Iter en Russie, saluant cette réalisation “unique” après plus de huit ans de travail. Sur les six bobines conçues avant la première production de plasma prévue en 2026, quatre sont fabriquées en Europe occidentale et une autre a été fabriquée en Chine, sous responsabilité européenne.

“Tout serait perdu”

L’imposante pièce russe devait partir en mai, mais l’interdiction faite aux navires russes de faire escale dans un port européen en raison de sanctions liées à son attaque contre l’Ukraine a retardé son départ. Il n’est pas question que la Russie ne “remplisse pas ses obligations” dans cet important projet international, a fait valoir Viatcheslav Perchoukov, représentant spécial de Rosatom pour les projets internationaux, selon qui “l’actualité a peu d’effet sur l’avancement du projet”. Lire aussi Quel avenir pour la Station spatiale internationale après l’annonce surprise du retrait russe ? Dans la foulée de son intervention militaire en Ukraine, la Russie a néanmoins annoncé qu’elle se retirerait “après 2024” de la Station spatiale internationale (ISS), autre projet phare de la coopération scientifique ouest-russe. Mais à ce stade, aucune décision similaire n’a été prise pour Iter. “Tout le monde serait perdant” si la Russie devait se retirer ou être bloquée, a déclaré à l’AFP Andrey Mednikov, qui gère le projet de la roue. “Nous sommes tous une seule famille. (…) Il n’y a pas de compétition, rien”, a encore soutenu à l’AFP Leonid Khimtchenko, alors que Moscou et l’Occident, alliés de Kiev, s’affrontent depuis fin février au sujet de l’Ukraine. Avec l’UE, le Royaume-Uni, la Suisse, les États-Unis, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud et la Chine, la Russie représente 9,1 % des coûts de production des usines. Fruit d’une coopération scientifique entre 35 pays, l’idée du projet Iter est née après un sommet entre le président américain Ronald Reagan et le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev en 1985. VOIR AUSSI – Washington juge “regrettable” le retrait de la Russie de l’ISS