La Russie a envoyé en France, mardi 1er novembre, l’un des six aimants géants prévus pour mettre en œuvre le projet de fusion nucléaire ITER, l’un des grands projets scientifiques internationaux dans lequel Moscou reste impliqué malgré les sanctions. L’engin transportant la “bobine de champ polaroïd” fabriquée en Russie, sous la direction de l’agence atomique Rosatom, a décollé à Saint-Pétersbourg (nord-ouest), ont constaté des journalistes de l’Agence française (AFP). L’imposant aimant de 9 mètres de diamètre et pesant 200 tonnes est emballé pour un voyage de quinze jours, passant par Amsterdam avant d’arriver à Marseille. Cette bobine, en forme d’anneau, doit former la partie supérieure de la structure du “tokamak”, cette machine expérimentale en construction dans le sud de la France, qui vise à contrôler la production d’énergie à partir de la fusion de l’hydrogène, comme au coeur du Soleil. Lire aussi Article destiné à nos abonnés Au cœur du chantier ITER, qui va tenter de conquérir la fusion nucléaire à l’œuvre dans les étoiles
“Sans la bobine PF1, le tokamak ne peut pas fonctionner”, a résumé Leonid Khimchenko, directeur adjoint des affaires techniques au Centre ITER en Russie, qui a salué cette réalisation “unique” après plus de huit ans de travail. Sur les six bobines prévues avant la première production de plasma prévue en 2026, quatre sont construites en Europe occidentale et une autre a été construite en Chine, sous responsabilité européenne.

“Nous sommes tous une seule famille”

                   L’aimant a été chargé le 1er novembre 2022 sur une barge à Saint-Pétersbourg.  OLGA MALTSEVA / AFP  

L’imposant beau gosse russe devait partir en mai, mais l’interdiction faite aux navires russes de faire escale dans un port européen en raison de sanctions liées à son offensive militaire en Ukraine a retardé son départ. Pour autant, il n’est pas question pour la Russie de ne pas “remplir ses obligations” dans cet important projet international, a fait valoir Viatcheslav Perchoukov, le représentant spécial de Rosatom pour les projets internationaux, selon qui “l’actualité a peu d’effet sur l’avancement du projet”. Dans la foulée de son intervention militaire en Ukraine, la Russie a néanmoins annoncé qu’elle se retirerait “après 2024” de la Station spatiale internationale (ISS), autre projet phare de la coopération scientifique ouest-russe. Mais à ce stade, aucune décision similaire n’a été prise pour ITER. Écoutez aussi Fusion nucléaire, c’est quand ?
“Tout le monde serait perdant” si la Russie devait se retirer ou être bloquée, a déclaré à l’AFP Andrey Mednikov, qui gère le projet de la roue. “Nous sommes tous une seule famille. (…). Il n’y a pas de concurrence, rien”, a poursuivi M. Khimchenko, alors que Moscou et les alliés occidentaux de Kiev s’affrontent au sujet de l’Ukraine depuis fin février. Avec l’Union européenne, le Royaume-Uni, la Suisse, les États-Unis, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud et la Chine, la Russie contribue à hauteur de 9,1 % aux coûts de production de l’usine. Fruit d’une coopération scientifique entre trente-cinq pays, l’idée du projet ITER est née après un sommet entre le président américain Ronald Reagan et le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev en 1985. Lire aussi : L’article est destiné à nos abonnés Fusion nucléaire : nouveau record pour le JET européen
Le monde avec l’AFP