C’est un procès presque inattendu qui s’ouvre, vendredi 10 juin, devant les assises du Nord. Dino Scala, 61 ans, surnommé le « Violeur de Sambre », y apparaît pour une carrière, en partie soi-disant, de violeur en série. Entre 1988 et 2018, il a commis une série de viols et d’agressions sexuelles sur 56 victimes âgées de 13 à 48 ans. Il sera jugé d’ici le 1er juillet pour 17 viols, 12 tentatives de viol et 27 agressions ou tentatives d’agressions sexuelles. La première journée de son procès, qui débute à 14 heures, devrait être, après le tirage au sort du jury et l’exposé des faits, consacrée notamment à sa personnalité. Lire aussi Article pour nos abonnés « Le violeur de Sambre » : une affaire qui a tenu la police sous contrôle pendant vingt-deux ans
Il a reconnu “la grande majorité des événements”.
Le territoire de chasse attribué au « violeur de Sambre » s’étend dans un rayon de moins de 30 kilomètres autour de cette rivière, traversant la frontière franco-belge.
L’ancien ouvrier et entraîneur des clubs de football locaux a reconnu “la grande majorité des événements”, a expliqué son avocate, Me Margaux Mathieu. Il a fait “des aveux spontanés dès le début de sa détention par la police” et est toujours “dans la même volonté de s’expliquer, de répondre aux questions”, assure-t-il.
INFOGRAPHIE “LE MONDE”.
Les victimes, elles, “espèrent enfin pouvoir mettre un terme à ce qui leur est arrivé, avoir un début d’explication et être comprises”, selon Me Caty Richard, avocate de trois d’entre elles. “Pendant l’enquête approfondie”, certains ont estimé ‘n’y croyaient pas’”, a déclaré Me Fanny Bruyerre, avocate de neuf partis politiques.
L’enquête judiciaire débute en novembre 1996 par la plainte d’une femme de 28 ans qui a été violée sur une autoroute à Maubeuge. Un homme est sorti de l’ombre, lui a demandé s’il lui “fait peur”, avant de le traîner vers un cadavre. Son sperme se retrouvera sur l’herbe.
D’autres attaques suivent très rapidement. Les victimes sont presque systématiquement agressées au petit matin, en hiver, généralement sur la voie publique. Le mode opératoire est similaire : l’homme les attrape par derrière, les étrangle avec sa fourchette ou un anneau, pour les traîner.
Il les menace, souvent avec un couteau, il peut leur lier les mains et les pieds ou leur bander les yeux. Parfois, il leur demande de “compter” pendant qu’il part. Beaucoup diront qu’”ils ont vu la mort”. Pendant des années la police a multiplié les perquisitions, les comparaisons ADN, quadrillé la zone. Échec : Le premier licenciement a été annoncé en 2003.
Rapport conjoint
L’affaire a dégénéré en 2006 après une série d’attentats en Belgique. D’autres plaintes plus anciennes viennent ensuite se rapprocher du dossier. Mais le coupable reste non élucidé. Type européen, marron, taille moyenne : “On avait une description normale, une voiture ordinaire”, et surtout “un ADN qui ne ‘collait’ pas”, se souvient Romuald Muller, directeur de la Police judiciaire de Lille qui a suivi l’enquête depuis le début . Vérifications, recoupements, auditions : “Les chercheurs ont fait un travail difficile”, a déclaré Muller. Mais la chasse tourne en rond. Jusqu’à l’agression d’un adolescent en février 2018 à Erquelinnes, en Belgique. Une Peugeot 206 est filmée par CCTV, à proximité. Le chauffeur, Dino Scala, père de cinq enfants, sera interpellé quelques semaines plus tard à Pont-sur-Sambre, à la grande surprise de son entourage, qui le décrit comme largement “poli”. Un couteau, des lacets et des gants ont été retrouvés lors de la perquisition. Son ADN est présent sur de nombreuses scènes de crime. Il a avoué une quarantaine d’atteintes à la garde à vue, évoquant des “prompts” incontrôlables. Pourtant, il conteste « une quinzaine », « formellement et constamment », selon son avocat. Plus tard, il dira qu’il « en veut » aux femmes et qu’il s’est toujours senti insuffisamment reconnu, « éternel second » dans sa vie professionnelle et intime. La recherche dresse le profil d’un “prédateur” avec une vie “organisée autour” de ces crimes. « Je tirais, (…) j’ai remarqué où les femmes passaient. “J’aime être caché, me cacher”, avouera-t-il lors de l’enseignement, évoquant la “nature du chasseur”. Selon des psychologues experts, sa jouissance provenait plus de la “domination des autres” que des rapports sexuels. Le monde avec l’AFP