La Corée du Nord a lancé jeudi de nouveaux missiles, dont un missile balistique intercontinental (ICBM) apparemment raté et un autre de “type non spécifié”, au lendemain d’un lancement record qui a fait monter les tensions dans la région. “La Corée du Nord a lancé un missile d’un type non spécifié”, ont affirmé jeudi les chefs militaires sud-coréens sans plus de précisions, quelques heures après que Séoul a annoncé la reprise des exercices militaires aériens avec les Etats-Unis. Poursuivre ces exercices est “un choix très dangereux et erroné”, a déclaré Park Yong-chon, secrétaire du Comité central du Parti des travailleurs nord-coréens, dans un communiqué de presse diffusé par l’agence de presse officielle KCNA. Ce lancement a été précédé d’autres lancements jeudi, dont un lancement de missile balistique qui, selon Séoul, a échoué. Les Etats-Unis ont dénoncé “le lancement illégal et déstabilisateur d’un missile balistique intercontinental” et la présidence allemande du groupe G7 a dit le condamner “dans les termes les plus forts”. Selon l’état-major sud-coréen, les trois premiers missiles – deux missiles à courte portée suivis d’un ICBM – ont été tirés jeudi matin depuis le Nord vers la mer du Japon. “Le lancement par la Corée du Nord d’un ICBM était susceptible de se solder par un échec” lors de la séparation du deuxième étage du missile, a déclaré l’armée sud-coréenne. Selon elle, ce missile a parcouru 760 km à une hauteur maximale de 1 920 km et à une vitesse de Mach 15 (15 fois la vitesse du son). Les deux autres premières fusées ont parcouru environ 330 km à une vitesse de Mach 5 et une hauteur maximale de 70 km. Les sirènes des raids aériens ont retenti pour la deuxième journée consécutive sur l’île sud-coréenne d’Ulleungdo, située à 120 km à l’est de la péninsule coréenne, ont rapporté les médias locaux. L’alarme a également été donnée dans le nord du Japon même si, contrairement aux premières affirmations des autorités, le missile n’a finalement pas survolé l’archipel. Selon le ministre de la Défense Yasukazu Hamada, le missile “a disparu au-dessus de la mer du Japon”. Des écrans de télévision diffusent une émission consacrée aux missiles nord-coréens, le 3 novembre 2022 à Séoul (AFP / Jung Yeon-je) “Le barrage continu de missiles chaque jour est scandaleux et ne peut être toléré”, a déclaré le Premier ministre japonais Fumio Kishida. Le 4 octobre, un missile balistique nord-coréen a survolé le Japon pour la première fois en cinq ans. Mercredi, la Corée du Nord avait déjà tiré 23 missiles, dont l’un a franchi la “Northern Limit Line” (NLL) qui prolonge la frontière terrestre intercoréenne dans la mer, tout en restant dans les eaux internationales.

– “Invasion territoriale” – Le président sud-coréen Yoon Suk-yeol lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale sur le lancement de missiles nord-coréens, à Séoul, le 2 novembre 2022. (Bureau présidentiel sud-coréen/Handout) Selon l’armée sud-coréenne, c’était la première fois depuis la fin de la guerre de Corée en 1953 qu’un missile nord-coréen terminait sa course si près des eaux territoriales du Sud. Le président sud-coréen Yoon Suk-yeol a déclaré mercredi que la fusillade constituait une “invasion territoriale de facto”. Cette démonstration de force de Pyongyang intervient au moment où la Corée du Sud et les Etats-Unis mènent les plus grands exercices aériens de leur histoire dans la région. Les deux alliés ont décidé jeudi de prolonger ces exercices “à la lumière des récentes provocations du Nord”, a déclaré l’armée sud-coréenne. Lancement d’un missile nord-coréen (AFP / ) L’exercice, baptisé “Alert Storm”, inquiète Pyongyang car il mobilise des avions furtifs F-35A et F-35B, selon des analystes. Des dispositifs qui “pourraient être utilisés dans les opérations de décapitation” du régime de Kim Jong Un, a fait valoir Goh Myeong-hyun, chercheur à l’Institut Asan d’études politiques. Au cours de l’été 2022, des rapports ont en effet fait état d’entraînements américano-sud-coréens à des frappes éclair de “décapitation” contre des dirigeants nord-coréens. Ajoutant aux craintes de Pyongyang, qui voit déjà de fréquentes manœuvres conjointes entre les militaires américains et sud-coréens comme des répétitions générales pour une invasion de son territoire. “Vigilant Storm” est “une manœuvre militaire agressive et provocatrice visant la République populaire démocratique de Corée”, a accusé mercredi le régime nord-coréen, menaçant Séoul et Washington de “payer le prix le plus horrible de l’histoire”. Les États-Unis et la Corée du Sud avertissent depuis des mois que la Corée du Nord est sur le point de procéder à un essai nucléaire, qui serait son septième.

– Futur essai nucléaire ? – Fin septembre, le régime de Kim Jong Un a adopté une nouvelle doctrine proclamant “l’irréversibilité” du régime nucléaire du pays, rendant impossibles les futurs pourparlers de dénucléarisation et se réservant le droit de mener des frappes préventives. Cette déclaration a été suivie en septembre et octobre d’une longue série d’essais de missiles, présentés par Pyongyang comme des simulations « nucléaires tactiques ». La récente vague de tirs “sont des célébrations préliminaires pour leur futur essai nucléaire”, a prédit Ahn Chan-il, chercheur spécialiste de la Corée du Nord. “Cela ressemble aussi à une série de tests pratiques pour leur développement nucléaire tactique”, a-t-il déclaré à l’AFP. Missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) Hwasong-17 lors d’un défilé militaire sur la place Kim Il Sung à Pyongyang le 26 avril 2022 (KCNA VIA KNS/STR) La Corée du Nord a rompu en mars un moratoire de 2017 sur les essais de missiles balistiques intercontinentaux, mais a depuis subi plusieurs revers. Toujours en mars, un Hwasong-17, considéré comme l’ICBM le plus puissant développé par Pyongyang à ce jour, a apparemment explosé peu de temps après son lancement et une boule de feu a été vue dans le ciel au-dessus de la capitale du nord. Et en mai, l’armée sud-coréenne a signalé un échec de lancement d’ICBM.