En France, derrière le slogan #BalanceTonPorc, la journaliste Sandra Muller témoigne du harcèlement sexuel qu’elle a subi au travail. Dans son sillage, d’autres victimes dénoncent des acteurs, journalistes, sportifs, hommes politiques, artistes, écrivains… La France avait déjà connu, en 2016, le cas de Denis Baupin, député écologiste accusé de harcèlement et d’agressions sexuelles, et en juin 2017, l’affaire Gérard Darmanin, alors que le ministre faisait l’objet d’une plainte pour viol. Mais #MeToo a considérablement accéléré la sensibilisation du public à l’ampleur de la violence sexiste. Franceinfo capte le fil des 19 cas, sélectionnés pour être médiatisés. La majorité de ces enquêtes (douze) sont toujours en cours, alors que certaines sont ouvertes depuis plusieurs années. Et une partie (cinq cas) des événements rapportés sont anciens et prescrits. D’autres se dirigent vers ce résultat. Dans une affaire de viol, un adulte a vingt ans à compter de la date du crime pour intenter une action en justice. Un mineur a trente ans après être devenu majeur pour dénoncer les faits, soit jusqu’à l’âge de 48 ans, conformément à la loi Schiappa du 3 août 2018. Dans une affaire d’agression sexuelle, un majeur a six ans pour porter plainte. Après les événements et vingt ans pour un mineur, à compter de sa majorité.
Affaire Éric Brion – Sandra Muller
13 octobre 2017 : Sandra Muller lance le mouvement #balancetonporc Statut de l’affaire : décidé L’ancien patron d’Equidia Eric Brion devant la cour d’appel de Paris, le 27 janvier 2021. (ALAIN JOCARD / AFP) Le 13 octobre 2017, en pleine affaire Weinstein, la journaliste Sandra Muller rapporte sur Twitter des propos à caractère sexuel tenus par Eric Brion, ancien patron de la chaîne Equidia, mais ne porte pas plainte. “Tu as de gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit” Eric Brion ex patron d’Équidia #balancetonporc — Sandra Muller (@LettreAudio) 13 octobre 2017 En réponse, Eric Brion a intenté une action en diffamation et a gagné au premier chef. Mais en mars 2021, la cour d’appel libère Sandra Muller. La décision a été confirmée en mai 2022 par la Cour de cassation, qui a estimé que les propos de Sandra Muller reposaient sur “une base factuelle suffisante” pour lui faire “bénéficier de la bonne foi”. Elle estime également que Sandra Muller a contribué à “une discussion d’intérêt général concernant le signalement de comportements à caractère sexuel non consensuels de certains hommes envers les femmes”. Retour à la liste des entreprises
Affaire Pierre Joxe
18 octobre 2017 : Ariane Fornia accuse l’ancien ministre Pierre Joxe d’agression sexuelle Etat du dossier : décidé Pierre Joxe, à Paris, le 5 octobre 2012. (JACQUES DEMARTHON / AFP) Le 18 octobre 2017, au milieu de l’explosion de la vague #Balancetonporc, Ariane Fornia publie un long billet de blog dans lequel elle raconte avoir été victime de plusieurs agressions sexuelles dans sa jeunesse, dont une à l’Opéra Bastille. , quand il a environ vingt ans. La fille d’Eric Besson, ancien ministre de Nicolas Sarkozy, ne nomme pas son agresseur. Il mentionne “un ancien ministre de Mitterrand, membre de plusieurs gouvernements, qui a eu des fonctions dominantes”. Le nom de Pierre Joxe, 87 ans aujourd’hui, est vite ressorti. L’ancien ministre de l’Intérieur proteste contre une “plainte calomnieuse et scandaleuse” et demande des “excuses écrites et publiques”. Devant le refus de l’auteur, il décide de la poursuivre en justice. En première instance, en janvier 2020, le tribunal de Paris avait tranché en faveur de Pierre Joxe, estimant qu’Ariane Fornia devait “disposer d’éléments lui permettant d’étayer les faits qu’elle dénonçait publiquement”. En janvier 2021, la cour d’appel de Paris casse cette décision et confirme qu’Ariane Fornia peut “bénéficier du fait justifiant de la bonne foi”. Pierre Joxe annonce aussitôt son appel. En mai 2022, la Cour de cassation confirme la libération d’Ariane Fornia. Elle considère que “les propos incriminés reposaient sur une base factuelle suffisante et que, eu égard au contexte dans lequel ils ont été tenus, le bénéfice de la bonne foi doit être reconnu”. Retour à la liste des entreprises
Affaire Tariq Ramadan
20 octobre 2017 : Henda Ayari est la première femme à porter plainte pour viol contre l’islamiste Tariq Ramadan Etat de l’affaire : en cours Tariq Ramadan, au tribunal de Paris, le 13 février 2020. (THOMAS SAMSON / AFP) C’est elle qui a lancé la grande affaire Tariq Ramadan. Le 20 octobre 2017, Henda Ayari, une ancienne salafiste devenue militante laïque, a porté plainte contre l’islamologue suisse. Elle l’accuse de l’avoir violée dans une chambre d’hôtel en 2012. Quelques jours plus tard, une autre femme a saisi la justice pour dénoncer des faits similaires datant de 2009. Dans son témoignage consulté par Le Monde (article abonné), « Christelle », qui était portant à l’époque une jambière, a décrit plusieurs viols et plusieurs passages à tabac lors d’une réunion dans un hôtel de Lyon. Le théologien a été inculpé en février 2018 à la suite de ces deux allégations. En mars 2018, Mounia Rabbouj accuse le prédicateur de viols répétés en 2013 et 2014. Cette ancienne escorte de 45 ans décrit aux enquêteurs le même modus operandi que les autres plaignantes : une phase de séduction sur les réseaux sociaux, puis les rencontres se passent très bien. rapidement à la violence. Un mois plus tard, une quatrième plainte est déposée en Suisse par “Brigitte”, qui accuse Tariq Ramadan de l’avoir violée à Genève en octobre 2008. En novembre 2018, après neuf mois de détention provisoire, Tariq Ramadan a été libéré sous contrôle judiciaire. En février 2019, il dépose une plainte en « plainte diffamatoire » contre ses trois accusatrices françaises. En avril 2019, une ancienne animatrice de radio de la région lyonnaise a à son tour porté plainte contre l’islamiste, qu’elle accuse de l’avoir violée collectivement lors d’un meeting dans sa chambre d’hôtel en 2014 dans le cadre d’une “interview”. En septembre 2019, le parquet de Paris a décidé d’élargir son enquête à de nouvelles données, suite au témoignage de deux femmes, interrogées comme témoins par la police après avoir été identifiées sur des photos trouvées sur l’ordinateur de l’islamiste. Elles affirment avoir subi des rapports sexuels brutaux : l’un en novembre et décembre 2015 et l’autre en mars 2016. En février 2020, Tariq Ramadan est accusé d’avoir violé ces deux femmes. En octobre 2020, l’islamiste est accusé du viol de Mounia Rabbouj, sa troisième accusation. Cette mise en examen avait été demandée en 2018 par le parquet de Paris, mais les juges avaient suspendu leur décision. Ainsi, Tariq Ramadan compte quatre chefs de viol en France. Le 12 avril 2022, après quatre ans d’enquêtes, deux enquêteurs parisiens annoncent la fin de leur enquête. Trois mois plus tard, le parquet de Paris demande un procès d’assises pour les viols d’Henda Ayari, Mounia Rabbouj et d’une des femmes identifiées sur la photo, ainsi que le “viol sur personne vulnérable” dans “Christelle”. L’accusation explique que les victimes “étaient toutes sous l’emprise” de Tariq Ramadan “au vu de l’admiration voire du respect que[il] s’exerce sur eux ». Les avocats de l’accusé rejettent ce « piège » et estiment que les plaintes résultent de « frustrations affectives ou sexuelles » voire d’un complot politique, ce qui a été dénoncé par leur client. Tarik Ramadan sera également jugé prochainement à Genève, suite aux accusations de la lanceuse d’alerte suisse “Brigitte”. Retour à la liste des entreprises
cas Luc Besson
19 mai 2018 : L’actrice belge Sand Van Roy accuse le producteur Luc Besson de viol. Statut du dossier : en cours Luc Besson, en Allemagne, le 12 septembre 2018. (JEAN-MARC LOOS / MAXPPP) En pleine cérémonie de clôture du 71e Festival de Cannes, marquée par un discours émouvant d’Asia Argento, l’une des accusatrices d’Harvey Weinstein, le média révèle qu’une plainte pour viol a été déposée par une jeune actrice belge, Sand Van Rooy, contre un géant du cinéma français : le réalisateur et producteur Luc Besson. Cet ancien mannequin de 27 ans l’accuse de l’avoir agressée dans un hôtel parisien. Deux mois plus tard, elle dénonce d’autres viols commis, selon elle, pendant deux ans de “relation d’influence professionnelle” et de harcèlement moral. Luc Besson aurait menacé de l’exclure lors du montage des films dans lesquels elle a joué. Le réalisateur a toujours démenti officiellement ces accusations, dénonçant une “toile de mensonges” et confirmant qu’il s’agissait de “rapports sexuels absolument consensuels”. En février 2019, après neuf mois d’instruction, la plainte est classée sans suite par le parquet de Paris, qui précise que les investigations “n’ont pas permis de caractériser l’infraction reprochée”. L’actrice porte alors plainte auprès d’une partie statutaire…